Wednesday 16 March 2005
La patience est un vilain défaut
Un site de rencontres sur Internet doit être un moyen irremplaçable pour être mis en contact avec des garçons et des filles que nous n’aurions jamais croisés dans la vie. Mais Internet ne doit surtout pas se substituer à une relation en chair et en os en nous faisant passer plus de temps qu’il ne le faudrait en compagnie d’un écran plutôt que d’un être humain. Si ça colle, ça n’engage à rien d’aller boire un verre pour voir si les affinités de clavier peuvent se transformer en affinités de coeur. C’est un vice d’Internet - dans lequel je suis tombé comme beaucoup au début de cette aventure blogesque - que le fait d’être poussé si on n’y prend garde à rester caché chez soi à jouer du clavier plutôt que de la langue et à construire sur du néant une relation idéalisée qui tient plus de la science-fiction que de la science hormonale.
J’ai chatté dernièrement avec deux filles radicalement opposées dans leur façon d’aborder l’échange virtuel.
La première a 26 ans, elle est venue discuter avec moi un soir et m’a envoyé deux petites photos (une jolie asiatique). Plutôt que parler de nous, nous avons surtout déliré sur un thème particulier façon exercice de style. Nous avons chatté à peine plus de 2 heures ensemble, pas assidûment d’ailleurs car je jonglais avec les fenêtres MSN. Au moment de lui dire au revoir, son ton a brusquement changé et je me suis progressivement rendu compte qu’elle était vexée que je ne lui propose pas un rendez-vous quelque part :

Je lui ai donc passé un petit coup de fil et tout est à peu près rentré dans l’ordre, mis à part que j’ai continué à ne pas lui proposer de rendez-vous, ne sentant pas suffisamment d’affinités entre nous.
La deuxième demoiselle a 22 ans, elle est venue me parler un autre soir. Elle m’avait déjà envoyé un mini-mail auquel je n’avais pas répondu un mois plus tôt. Je lui ai trouvé beaucoup de répondant, un style qui m’a vraiment séduit : vive, taquine et sympathique. Nous chattons un peu ensemble le lendemain puis le surlendemain. Puisque nous sommes partis sur un sujet intéressant, et comme mes doigts commencent à se fatiguer à taper sur le clavier, je lui propose de lui téléphoner pour poursuivre notre débat, d’autant plus que j’ai un forfait de téléphonie mobile qui me permet de téléphoner gratuitement le week-end :

Notre conversation s’est un peu poursuivie sur le sujet puis je lui ai proposé d’en rester là, franchement déçu. Je comprends très bien son point de vue, je comprends qu’elle puisse être timide mais je n’ai pas le temps de l’apprivoiser : elle n’a pas suffisamment de maturité à mon goût (d’autant plus après avoir constaté, juste avant, son approche très ado de la sexualité) alors ça ne m’intéresse pas d’aller plus loin. Si son argument avait été qu’elle ne voulait pas donner un numéro de fixe à un inconnu, je l’aurais sincèrement comprise. Là, elle préfère se cacher dans le virtuel, c’est tout à fait différent pour moi d’autant plus que je me suis promis qu’on ne m’y reprendrait plus !
Je reste tout de même un peu ébahi et amusé par cette radicale opposition entre ces deux demoiselles sur leur regard sur nos échanges. Pour la première, j’étais un « timide caché derrière son écran » au bout de 2 heures de chat. Pour la seconde, je suis un « homme plein d’assurance incorrigiblement impatient » au bout de 3 jours ! Quel contraste !
La première a raison de ne pas vouloir perdre de temps (elle manque un peu de tact quand même !). Elle aurait juste dû me proposer elle-même une rencontre puisqu’elle y tenait tant plutôt que d’attendre que « l’homme fasse la démarche » et de se frustrer toute seule ! La seconde se morfond dans le virtuel, elle risque de passer à coté de beaucoup de choses si elle n’évolue pas. Internet qui devait rapprocher les gens rajouterait-il une barrière supplémentaire dans nos rapports aux autres ?
|